Quatre cent kilomètres plus au sud de Hanoï à vol d’oiseau s’étend une petite ville très touristique mais prospère. Pour une fois, nous dérogerons à la règle très respectée jusqu’ici en achetant des billets pour le moyen de transport le plus cher, l’avion. Le train prend presque 20h, ce n’est pas pour nous déranger, mais nous n’avons pas beaucoup de temps au Vietnam, seulement trois semaines. Nous préférons donc dépenser nos 100 euro pour deux pour un vol de 1h contre 20h de train et arriver beaucoup plus vite dans la ville de Hoi An (en réalité, l’avion atterrit dans le seul aéroport à la ronde, à Danang à une heure de bus).
Au Vietnam, une tripotée d’agence low cost se disputent les liaisons aériennes internes. Les prix sont réduits à trois fois rien – quarante cinq euro pour un billet, qu’est-ce que c’est ? – à se demander où le manque à gagner disparait. Nous le découvrirons très vite arrivés à l’aéroport. Pas de billet mais un ticket de caisse, pas de vrai suivi de bagage mais un numéro, comptoir reclus au sous-sol et… la palme d’or : un bon vol charter qui doit trouver un horaire de décollage comme il peut, en laissant priorité au gros zavions qui rapportent. C’est ce qui nous arrivera ! Il est 10h15, notre porte annonce un embarquement comme prévu mais une fois sur place, nous découvrons tous avec stupéfaction que ce n’est pas notre vol qui est annoncé. Y a t il erreur ? Apparemment non. Patience donc, attendons que Monsieur Vietnam Airline décolle. L’impatience générale de la foule prend forme une heure plus tard alors que nous n’avions toujours pas d’information, notre vol ayant disparu des écrans d’indications. Nous apprenons malheureusement grâce à quelques énergumènes s’énervant sur les hôtesses d’accueil que nous notre vol est repoussé à…
15h30 !
On nous propose, toujours grâce à l’énervement des énergumènes, des tickets-repas pour compenser nos cinq heures de décalages de vols. La soupe sera plus que bof, surtout lorsque je découvrirai la considération de notre compagnie vis à vis de nous en nous servant non pas des soupes instantanées (valeurs 8 000 dong, soit 30 centimes), mais en nous offrant « gracieusement » des vieux bols de soupes instantanées nettoyés remplis de nouille de riz nature, un peu de poulet et d’eau chaude ! Il y aura un peu de piment pour rehausser le goût. Par chance, l’ancien pot de nouille aura gardé le goût de son prédécesseur pour apporter une note cachée de citronnelle. Merci JetStar pour nous rabaisser encore un peu plus bas ! L’avion finira par décoller à 16h30, vous vous doutez que l’heure annoncée a encore été décalée, pour finalement nous conduire avec six heures de retard à Hoi An
Connue sous le nom de Faifo au temps des premiers marchands occidentaux, Hoi An fut du 17ème siècle au 19ème siècle, l’un des principaux ports internationaux d’Asie du Sud-Est. Navires et marins basés ici sillonnaient tout le Vietnam, la Thaïlande et l’Indonésie. Au printemps, poussés par les vents, navires chinois appareillaient vers le Sud jusqu’à Hoi An. Ils y séjournaient jusqu’à l’été reprenant la mer avec les vents favorables. Au cours de leurs quatre mois en ville, les marchands louaient sur le front de mer des maisons qui servaient à la fois d’entrepôt et de résidence. Certains d’entre eux y installèrent par la suite des représentants pour gérer leurs affaires sur place le reste de l’année : c’est ainsi que s’implantèrent les premières colonies étrangères, les premières colonies chinoises.
Actuellement, on estime à 1 300 le nombre d’habitants d’origine chinoise à Hoi An.
Mais l’ensablement du fleuve Thu Bon (Cai) reliant Hoi An à la mer commença à gêner la navigation ; Danang éclipsa peu à peu Hoi An en tant que port et centre de commerce. En 1916, un orage détruisit la ligne ferroviaire qui reliait Danang à Hoi An ; elle ne fut jamais reconstruite.
La petite cité ne perdit pourtant pas face, aujourd’hui encore des milliers de touristes viennent l’admirer. Et pour cause : elle a tour à tour échappé aux destructions des guerres successives. L’unique raison à cela sera l’habileté de ses commerçants à passer des accords avec les opposants du Vietnam, notamment pendant la guerre contre les américains. Hoi An ne fut donc pas bombardé et peut afficher fièrement sa nouvelle médaille : une inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO pour son effort de préservation de sa culture et de son patrimoine.
Hoi An est un point fort d’un voyage au Vietnam et ce n’est pas pour rien.
Nous réserverons un superbe hôtel à un prix défiant toute concurrence étant donné l’offre proposée, 12 euro au Sunflower Hôtel, à un défaut près, il est à vingt minutes de marche de la vielle ville. « Allez chéri, pense à la superbe piscine qui t’attend, la terrasse, le mini-bar extérieur, le restaurant et ce méga-super-gros buffet gratuit au petit dèj ! » Pour une fois ça sent l’été et on se la coule douce. Il faut bien de temps en temps…
La vieille ville de Hoi An est très jolie ! Bien entretenues, les vieilles bâtisses chinoises en bois et les vieilles maisons en pierres coloniales à la française se succèdent dans des petites rues paisibles. La circulation aux voitures a été fermée dans le vieux quartier et peu de scooter s’y aventurent. Quelques personnes habitent encore la vieille ville et le soir, des enfants jouent au milieu de la rue sans risquer leur vie, pas comme ailleurs. Un très joli tableau.
Un billet d’entrée de la ville – que nous n’avons pas pris – est proposé à 75 000 dong. Il permet de visiter certains monuments, anciennes demeures et boutiques d’artisanat. L’argent récolté est reversé aux associations d’entretiens des bâtiments du vieux centre et au maintien de certaines réglementations comme la contrainte des hauteurs des bâtiments et/ou de modification. Si seulement d’autres villes pouvaient suivre cet exemple ! Hoi An et son vieux quartier est vraiment plaisant. D’ailleurs, au premier regard, il nous a plu.
Ancien quartier commerçant international, il l’est toujours mais à des fins plus touristiques… Nous y découvrons une succession de boutiques (les vietnamiens ont vraiment ça dans le sang), brocantes, textiles, sculpteurs, bric à brac et… tailleur ! Il paraît que la ville compte pas moins de cinq cent tailleurs ! Mais tous ne se valent pas alors avant de partir à l’assaut de la perle rare, méfiez-vous. Même s’il est sûrement possible de se faire faire un super costume pour 50 dollars, mieux vaut bien réfléchir. Nous ne tenterons pas l’expérience de peur de ne pas tomber sur cette fameuse perle. Nous nous contenterons de regarder les belles collections, faire du lèche-vitrine comme on dit chez nous. Il y en a des centaines réparties sur plusieurs rues. La mode c’est du sérieux ici. Mesdames, si vous êtes accro au shopping, faites un petit tour par Hoi An pour refaire votre garde robe pour une centaine de dollars ou… fuyez !
Nous dépenserons nos dongs restant pour une tripotée de souvenirs. Bouddha rieur qui porte chance et argent, chat dorée chanceux, gong qui fait fuir les mauvais esprit. Avec ça si on a pas une chance d’enfer ! On est prêt à rentrer en France pour faire des affaires ! Nous ferons aussi plusieurs fois le tour de la ville à la recherche de lanternes à bon prix. La seconde spécialité de Hoi An, plus magique que la première et ses tailleurs, sont les lanternes chinoises. Des dizaines de boutiques se battent pour vendre leurs lanternes et s’alignent les unes après les autres. Quelques lanternes, les plus grosses, sont fabriquées sous nos yeux par des demoiselles assises par terre au milieu de l’entrepôt. Mais la majorité proviennent probablement des usines de Chine, ne nous mentons pas ; elles sont sous plastique, vous les reconnaitrez. Elles ont pourtant un avantage de taille : elles se replient. Et pour nous qui avons sans cesse besoin de place dans notre valise ou qui accusons du poids qui s’accumule sur notre dos à force d’acheter des souvenirs, c’est parfait.
Les lanternes chinoises sont suspendues un peu partout en ville et une fois la nuit venue, c’est très poétique. Ajouté à l’ambiance paisible du vieux quartier, vous comprenez maintenant pourquoi bon nombre craquent pour la ville.
Mais pour apprécier Hoi An, il faut aussi fermer les yeux aux rabatteurs opérant sans relâche matin et soir sur les quais afin de vous vendre une croisière en bateau, un sachet de cacahouète ou des bananes séchées. Avec la Chine et nos récentes aventures au Vietnam, nous commençons à avoir l’habitude d’être sans cesse interpelés pour des bêtises et nous restons calmes et lâchons des sourires. Après tout, ils sont humains, énervant ou pas, il faut les respecter.
En réalité, après plusieurs jours d’observations, nous découvrons que nous sommes bien moins harcelés que la plupart des touristes dans la rue. Pourquoi ? Question restée sans réponse. On est jeune, fauchés se disent-ils ? Avons-nous un look si à plaindre désormais ? Serait-il temps de faire un tour chez le tailleur d’à côté (coiffeur OUI, on sait) ? Étrange.
A la question « Combien de temps restez-vous ici ? » nous répondons « Oh, une semaine » et nous savons au fond de nous que la réponse classique tant attendue est de l’orde de deux jours, grand maximum. Notre interlocuteur change souvent de regard à ce moment là.
Cela fait déjà deux semaines que nous sommes au Vietnam et nous arrivons très bien à vivre avec ses habitants. Parfois ils sont agaçants à toujours compter mais souvent notre effort de communication dans leur langue paye (Fabien commande toujours en lisant le noms des plats vietnamiens et non leur traduction anglaise ; on apprend vite quelques mots aussi comme « com » pour riz ou « thom » pour ananas, « ga » pour poulet, etc) et la situation se détend.
Une anecdote dans cette ville est très rigolote…
Nous avions besoin d’acheter une grande bassine au marché afin de faire tremper notre linge. Dans quelques jours nous allons grimper dans les hauts plateaux du Vietnam et entamer notre périple en terre « impaludée ». En plus de notre traitement préventif bientôt en vigueur (Doxypalu), nous allons porter des vêtements longs à la tombée de la nuit, trempés dans un produits contre les moustiques, d’où la bassine. Direction son achat au marché de Hoi An. Sur place, des femmes tentent de nous vendre leurs babioles-souvenirs, nous refusons en pointant du doigt ce que nous cherchons. Elles ouvrent grands les yeux, elles ont l’air surpris. Mais que vont-ils faire d’une bassine ???
La vendeuse nous accueille étonnée, affiche un prix puis se ravise – en écrivant sur la paume de sa main car elle ne parle pas anglais. Elle s’auto-rabaisse, une réaction inédite au Vietnam. Nous nous en tirons donc à très bon prix et partons en ballade dans la vieille ville avec notre bassine. C’est Fabien qui se chargera de la transporter, sous le coude, ce qui qui lui attirera la sympathie des habitantes. Grands sourires à son passage, pouffements, grands signes encourageurs, interrogations.
« Et toi, pourquoi as-tu une bassine avec toi ? »
« Pour laver mon linge. »
« Oh vraiment ? Tu vis ici ? »
Nous rigolons avec elles. C’est sûr, cette bassine aide à la communication ! Pourquoi ne pas l’avoir achetée plus tôt ?
Quand la scène la plus drôle arrive.
Une vietnamienne sur son bateau nous interpelle. Elle veut savoir quel prix nous avons mis pour la bassine. Nous haussons les épaules, qu’est-ce que ça peut lui faire ? Elle insiste. Je m’arrête près d’elle et pose lui la question. Elle me dit : « Je veux la bassine ». Je repose la question, n’étant pas très sûr de sa réponse. « Je veux acheter cette bassine, vraiment. Mais quel est ton prix ? » Elle a l’air on ne peut plus sérieuse. Nous sourions et Fabien serre dans ses bras la bassine.
« Non, non, elle n’est pas à vendre ».
« Vous êtes sûr ? »
« … eu allez, 50 000 dong »
« Trop cher ! »
Nous la quittons en rigolant. La scène est magique. Et le pire, c’est qu’elle se reproduira une heure plus tard ! Les vietnamiennes utilisent beaucoup de bassine faute d’avoir un évier chez elle. L’idée surgit… et si on faisait commerce de bassine ? On pourrait se faire quelques dong ?
Trêve de plaisanterie, notre séjour à Hoi An fut vraiment une réussite. La vieille ville a su conserver son architecture coloniale tout en ne faisant pas du coin un quartier « musée ». Nous qui voyageons à la recherche de maisons d’habitations, c’est un plaisir. A dix milles lieux de l’agitation de Hanoï, le vieux Hoi An et sa périphérie (moins typique), nous semblent être une ville paisible et à la vie heureuse.
Nous profiterons donc de nos six jours à vivre au jour le jour comme si on était d’ici. Nous faisons tous les jours notre petit marché à la recherche de fruits exotiques. Il faut reconnaître qu’ils sont délicieux au Vietnam… Le retour en France s’annonce difficile. Nous n’hésitons plus à manger dans les petits restaurants locaux (c’est eux qui ont le plus besoin de nos sous après tout) mais nous n’hésitons pas non plus à nous faire plaisir de temps en temps en mangeant dans un restaurant plus « haut de gamme » mais dans nos prix ! Quand le haut de gamme devient accessible… enfin…
Bref, nous retournons à Hoi An avec plaisir ! Mais il faut partir, nous allons enfin sortir des sentiers battus et ce n’est pas peu dire…
[…] broncher, que je me suis mise à faire bouillir de l’eau afin de remplir ma bassine rouge (celle du Vietnam) afin de me laver comme nous l’avons parfois fait en Inde : une petite casserole dans la […]